Jeanne Moll (AGSAS)

Des difficultés et des bénéfices, pour les enseignants et les psychologues, de rejoindre un groupe interdisciplinaire de réflexion comme le Soutien au Soutien

Jeanne Moll a longtemps enseigné l’allemand en lycée avant de se tourner vers les sciences de l’éducation à l’Université de Genève où elle a travaillé avec Mireille Cifali ; elles ont publié ensemble Pédagogie et psychanalyse (Dunod, 1985)
Devenue enseignant-chercheur à l’IUFM d’Alsace et à l’Université Louis Pasteur à Strasbourg, elle a axé ses cours sur les apports de la psychanalyse à la pédagogie, sur les déterminants et la complexité de la relation éducative, sur les rapports entre l’apprentissage et l’enseignement, sur l’importance du regard et de la parole etc. : autant de thèmes qu’elle a abordés dans de nombreux articles publiés dans diverses revues et au cours de conférences données en France, à Aoste, à Lausanne, à Lisbonne, à Louvain-la-Neuve.

Sa rencontre, au tout début des années 1990, avec le fondateur des groupes de Soutien au Soutien, le psychanalyste Jacques Lévine, l’a incitée à collaborer avec lui et à se former à l’animation des groupes de S. au S. Elle a dirigé avec lui la rédaction du livre collectif Je est un Autre (ESF, 2001, réédité en 2008) puis Prévenir les souffrances d’école (ESF, 2009).

Actuellement présidente d'honneur de L’Association des groupes de Soutien au Soutien (AGSAS), elle est rédactrice en chef de sa revue annuelle "Je est un Autre" où sont publiés, entre autres, les textes des conférences faites au colloque annuel d’octobre de l’AGSAS.

Jeanne Moll a rassemblé un choix d’articles et de textes de ses conférences dans un ouvrage publié en 2015 chez L’Harmattan, En pédagogie, chemin faisant ...
On peut lire en outre d’autres textes de sa plume sur le site de l’AGSAS, rubrique " publications".

Résumé :
Confrontés à des demandes parfois contradictoires venant des enseignants, de l’institution et des parents, les psychologues sont censés apporter des réponses aux appels à l’aide qu’on leur adresse chaque jour à l’école. Mais les situations relationnelles difficiles, toujours plus complexes qu’il n’y paraît, peuvent être difficilement résolues par une seule personne. Tout élève en souffrance, victime, complice ou auteur de violence, dans un contexte scolaire et sociétal lui-même violent, est « pris » dans un système de relations intersubjectives. Or, de nombreux enseignants, insuffisamment formés, sont pris au dépourvu face au surgissement de « microviolences » de plus en plus fréquentes à leur égard.

La fonction tierce du psychologue soutient l’appréhension de la complexité et le changement de regard face à une situation qui s’est cristallisée. La demande adressée au psychologue est parfois motivée par le désir inconscient pour l’enseignant d’être déchargé du poids que signifie la prise en charge des difficultés de l’élève. Faisant partie intégrante de la communauté professionnelle scolaire, le psychologue de l’école peut aussi être pris dans les mailles du filet institutionnel.

C’est pourquoi il me paraît nécessaire de promouvoir la création de groupes de Soutien au Soutien regroupant enseignants, psychologues et autres personnels de l’établissement. Ils pourront s’exercer, dans un esprit de non-jugement et de recherche, à réfléchir en interdisciplinarité aux déterminants de situations concrètes, à conjuguer des approches différentes, à affiner leur sensibilité à l’égard d’autrui et à casser les images qui enferment. Ils sauront ainsi, chacun de leur place et fonction, soutenir la dimension intacte du sujet afin de se réengager ensemble sur la voie d’un possible. Grâce au langage intermédiaire inventé par Jacques Lévine, et surtout grâce à l’éthique qui sous-tend le Soutien au Soutien, ils pourront se retrouver à égalité de dignité dans un projet d’accompagnement des jeunes et de foi en l’humain, envers et contre tout.
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